(France Soir du 2/09/2011) 
Indignation à la veille de la rentrée, un instituteur dénonce les méthodes de lecture en vigueur à l’école primaire, responsables selon lui de l’échec d’un grand nombre d’élèves.
Indignation à la veille de la rentrée, un instituteur dénonce les méthodes de lecture en vigueur à l’école primaire, responsables selon lui de l’échec d’un grand nombre d’élèves.
 
                    20% des élèves en sixième sont illettrés SIPA
« Pour la première fois de ma vie, j’ai bien dormi au mois d’août. »   A 58 ans, Marc Le Bris échappe cette année au stress de la rentrée   scolaire pour profiter de sa toute nouvelle vie de retraité. Cet   « instituteur à l’ancienne » enseignait depuis 1975 aux classes   primaires de l’école publique de Médréac, près de Rennes. Trente-cinq   ans plus tard, profitant de sa totale liberté de parole, l’heure est au   bilan. « Mes grands bonheurs professionnels, ce sont les moments   magiques où les enfants progressent. Comme cette récitation d’une tirade   entière du Cid où le reste de la classe, et moi avec, cache sa larme   d’émotion ; ou cette rédaction remarquable, tendre et précise, où une   petite fille décrit si bien ce qu’est sa vie… » Mais Marc Le Bris   est d’abord un indigné, qui s’alarme des « méthodes inefficaces » qu’on a   tenté de lui imposer. Un combat déjà ancien, pour lui, qui affiche sa   fierté d’avoir publié un brûlot, Et vos enfants ne sauront ni lire ni   compter, ou la faillite obstinée de l’école française, jugé   « réactionnaire » par certains de ses collègues. Il défend   l’apprentissage de la lecture par la méthode alphabétique traditionnelle   (lire encadré), le retour du calcul mental, des dictées et des   rédactions.
« Près de 8  élèves sur 10 vont se faire bousiller par  des méthodes de lecture qui  n’en sont pas. On leur demande de  reconnaître des mots entiers en  jouant aux devinettes, au lieu de leur  apprendre à déchiffrer syllabe  par syllabe. Cela ralentit  considérablement les choses. Il faut que les  mots soient mémorisés le  plus simplement possible. L’apprentissage des  associations de lettres  est incontournable. Sinon, on descend le  niveau de lecture durant  plusieurs générations, et on fabrique des  illettrés. »
20 % d’illettrés en sixième
Convaincu   d’avoir raison, Marc Le Bris a toujours enseigné sans tenir compte des   directives politiques, comme « un clandestin, qui travaille hors la   loi ». Sa rébellion lui a coûté cher : il a longtemps fait partie des   enseignants les plus mal notés dans le Finistère… mais porté aux nues   par les parents satisfaits des progrès de leurs têtes blondes. « Je   ne serais pas honnête si je n’avouais pas la satisfaction d’avoir eu   publiquement raison contre quelques petits chefs grâce aux résultats de   mes élèves. Les cadres de l’éducation nationale sont coupés de la   réalité », lâche-t-il.
Au  terme de sa carrière, cet ex-directeur  d’école constate que les  cascades de réformes ont abouti à un malaise  sans précédent. A  commencer, juge-t-il, par la loi Jospin de 1989, qui a  « noyé le CP  dans un cycle ». Cette réforme prévoit qu’on sache lire à  la fin du  CE1, et non plus du CP. Vingt-trois ans après, les résultats  sont loin  d’être concluants : les bancs de la sixième comptent environ  20 %  d’illettrés. « On empêche les enseignants de faire redoubler  les  enfants en difficulté en fin de cours préparatoire. C’est  dramatique,  car ce sont les mêmes qui abandonnent l’école au collège.  Les  conséquences d’une mauvaise lecture en CP sont les plus graves, les   plus durables et les plus génératrices de souffrance et d’échec. On   oublie qu’il n’y a pas deux enfants de 7 ans identiques : certains ont   besoin d’une année supplémentaire pour savoir lire. »
La détresse des jeunes enseignants
L’instituteur n’a pas que des détracteurs au sein de la profession, loin s’en faut. « A   la veille de la rentrée, je reçois des dizaines d’appels à l’aide de   jeunes collègues démunis pour enseigner la lecture à la sortie de leur   formation. Ils se trouvent dans un désarroi total. Les parents les   attendent au tournant, parce qu’ils savent que les nouvelles méthodes de   lecture ne marchent pas. » A quoi s’ajoute une difficulté   supplémentaire : de l’aveu général des enseignants, les enfants sont   « moins attentifs qu’avant ». « Il y a trente-cinq ans, les élèves   obéissaient tout de suite à un ordre de l’instituteur. Maintenant, on   doit leur demander cinq fois pour qu’ils obtempèrent », se désole Marc Le Bris. Il refuse néanmoins de stigmatiser l’attitude des enfants. « Je   ne nie pas les problèmes sociaux, mais j’estime que l’école a sa part   de responsabilité. Je suis persuadé qu’en appliquant une méthode de   lecture sérieuse, exigeante et contraignante, on réglera les problèmes   de comportement. Une école qui fonctionne peut compenser en grande   partie les carences éducatives actuelles. »
La guerre des méthodes
En France, plus de 20 % des élèves entrent actuellement au collège sans comprendre ce qu’ils lisent. Un chiffre inquiétant, qui suscite une polémique croissante depuis une dizaine d’années. Pour de nombreux parents, les méthodes de lecture appliquées au CP sont responsables de l’illettrisme. La fameuse « méthode globale », qui consiste à deviner les mots avant de savoir les déchiffrer, a notamment été accusée de provoquer la confusion dans l’esprit des enfants. Afin d’éteindre l’incendie, le ministre de l’Education a exigé dès 2005 que les enseignants « abandonnent une fois pour toutes » cette méthode au profit de la méthode syllabique (ou méthode Boscher), qui repose sur la découverte progressive de l’alphabet, des syllabes et des sons. Mais son intervention a provoqué une levée de boucliers parmi les enseignants, peu enclins à adopter une méthode d’apprentissage qu’ils jugent réactionnaire. Selon un sondage, seuls 8 % des enseignants de CP utilisent aujourd’hui une méthode purement syllabique et 76 % une méthode mixte incluant partiellement la méthode globale.
En France, plus de 20 % des élèves entrent actuellement au collège sans comprendre ce qu’ils lisent. Un chiffre inquiétant, qui suscite une polémique croissante depuis une dizaine d’années. Pour de nombreux parents, les méthodes de lecture appliquées au CP sont responsables de l’illettrisme. La fameuse « méthode globale », qui consiste à deviner les mots avant de savoir les déchiffrer, a notamment été accusée de provoquer la confusion dans l’esprit des enfants. Afin d’éteindre l’incendie, le ministre de l’Education a exigé dès 2005 que les enseignants « abandonnent une fois pour toutes » cette méthode au profit de la méthode syllabique (ou méthode Boscher), qui repose sur la découverte progressive de l’alphabet, des syllabes et des sons. Mais son intervention a provoqué une levée de boucliers parmi les enseignants, peu enclins à adopter une méthode d’apprentissage qu’ils jugent réactionnaire. Selon un sondage, seuls 8 % des enseignants de CP utilisent aujourd’hui une méthode purement syllabique et 76 % une méthode mixte incluant partiellement la méthode globale.
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